Le processus de résilience
Comme on peut le constater dans le documentaire Garder le Cap, Joany, Dave et Marie ont su développer leur résilience afin de surmonter des défis auxquels ils n’étaient tout simplement pas préparés.
Dans les faits, qu’est-ce que la résilience ? Est-ce qu’on naît avec cette capacité ou est-ce cela peut de développer ?
La résilience est un concept particulièrement développé dans les années 50 par différents chercheurs américains. Il a été davantage popularisé par Boris Cyrulnik, psychiatre et psychanalyste français.
La résilience est la capacité, de chacun, à reprendre un nouveau développement psychologique, après avoir vécu une épreuve significative. Les individus résilients vont avoir la capacité de s’adapter de manière flexible et ingénieuse aux situations qu’ils ne peuvent pas contrôler. En effet, ils vont puiser dans leurs qualités personnelles afin de modifier leurs comportements étant donné les nouveaux contextes auxquels ils font face.
Nous ne naissons pas résilients, ce n’est pas un état ou une qualité que l’on possède ou non à sa naissance. Nous pouvons devenir résilients en développant les compétences nécessaires afin de cicatriser une blessure causée par une expérience significative pour une personne, telle que la perte d’un enfant ou encore un diagnostic de cancer. En conséquence, être résilient n’est pas synonyme d’insensibilité et d’invulnérabilité. Les événements seront, au contraire, traversés avec de la souffrance et, parfois même, une souffrance intense. Toutefois, la souffrance sera utilisée afin de la transformer en satisfaction, en joie et même en épanouissement. Les difficultés de la vie quotidienne peuvent venir irriter une cicatrice d’une épreuve passée tandis que d’autres jours, l’expérience et les compétences acquises vont permettre de mieux comprendre et de compatir avec la souffrance extérieure.
Le processus de résilience
Il existe, selon différentes études, quelques étapes dans le processus du développement de la résilience. Il est important de distinguer le processus de résilience du processus de deuil. En effet, lors de l’annonce d’un diagnostic de trouble de santé mentale chez un proche, certains individus vont plutôt vivre les 7 étapes de deuil, tandis que d’autres vivront des étapes ressemblant davantage à la résilience. Par contre, l’un ou l’autre des parcours peut mener quelqu’un à développer sa résilience. Chacun expérimentera de manière différente les épreuves qu’il traversera. Toutefois, trois étapes peuvent être plus directement associées au processus de résilience.
Révolte
À cette étape, nous cherchons à comprendre le déroulement, ce qui aurait pu être fait différemment afin de l’éviter. Bref, on veut comprendre le « pourquoi moi »!
Déni
Le déni peut se présenter sous deux pôles différents.
- Les personnes vont chercher à transmettre à tout prix une image positive et forte de soi à leur entourage. Ils ne sollicitent pas la pitié de leur réseau, au contraire, ce sentiment peut les remettre en contact avec leurs réelles émotions, ce qu’ils veulent à tout prix éviter.
- Les personnes vont rejeter les impacts positifs qu’a pu avoir sur eux l’expérience Ils ne verront pas que cette expérience leur a permis de développer de nouvelles connaissances, de nouvelles capacités, de resserrer des liens, de tisser un réseau social, etc. Ils accentueront principalement les impacts négatifs que l’événement leur a fait traverser.
Défi
À ce stade, la personne voudra se servir de son épreuve afin de se surpasser. La fameuse phrase « Ils verront que je vais réussir à m’en sortir! » va entraîner une mobilisation de ses capacités ainsi que de son savoir, afin de transformer l’événement en triomphe et d’en sortir plus résiliente. La résilience n’est pas le « faire avec », c’est plutôt le « faire de ».
Qu’est-ce que nous pouvons faire pour être plus résilients?
Il existe certains éléments permettant d’améliorer ses propres capacités de résilience. Par contre, il n’y a aucun remède miracle. Ce qui suit peut outiller, afin d’accroître cette grande force. Toutefois, selon nos parcours personnels et de notre personnalité, certains éléments pourront être plus utilisés, tandis que d’autres seront moins propices pour notre propre rétablissement.
Développer la communication
La communication est le premier chemin vers la guérison. Parler des expériences que nous avons surmontées et panser les blessures qui ont pu en résulter représente, souvent, la première marche de l’escalier de la résilience.
Grâce à la communication, on est capable de se construire un réseau social. Souvent présente lors de la première étape, soit la révolte, la communication demeure l’un des moyens les plus efficaces afin de pouvoir reprendre du pouvoir sur notre vie et ainsi, transformer l’expérience en victoire.
Prendre des initiatives relationnelles
Les initiatives relationnelles sont la capacité de pouvoir s’exprimer sans imposer nos idées. Nous devons être capables d’exprimer nos désirs, nos opinions, nos convictions tout en respectant ceux d’autrui. En effet, une relation d’égal à égal enrichit les conversations ainsi que les dialogues et prône les relations respectueuses. Cette capacité est aussi étroitement liée à la capacité d’affirmation de soi et la valeur que nous attribuons à nos propres points de vue.
Ne pas céder à la culpabilité
Il est important de ne pas céder à la culpabilité relative à nos choix antérieurs. Nous devons plutôt chercher à nous définir par nos projets présents et futurs. En conséquence, revivre constamment le passé nous empêche d’avancer et de reprendre le pouvoir sur notre vie. De plus, si nous focalisons sur le positif, cela nous donnera l’énergie nécessaire à avancer et à persévérer.
Gérer son stress
L’anxiété est une émotion tout à fait normale que l’ensemble de la population ressent. Les situations anxiogènes sont toutefois, très différentes pour l’un que pour l’autre et chaque individu va développer ses propres stratégies afin d’y faire face. Plus nous avons du pouvoir sur notre stress, plus notre capacité à être résilient va s’améliorer.
Nouer des liens avec ceux qui ont vécu des difficultés semblables
La création d’un réseau de soutien qui a vécu des épreuves semblables peut nous aider à briser l’isolement et la solitude. Effectivement, nous allons nous apercevoir que nous ne sommes pas les seuls à vivre ces difficultés et qu’enfin d’autres personnes peuvent réellement comprendre la douleur que nous pouvons ressentir à l’intérieur de nous.
« L’important n’est pas ce qu’on fait de nous, mais ce que nous faisons nous-mêmes de ce qu’on a fait de nous. »
De ce fait, la résilience n’est pas une qualité que l’on possède ou non à la naissance, c’est plutôt par le développement de capacités personnelles qu’un individu va « faire de » l’épreuve qu’il a vécue un triomphe et ainsi, cicatriser cette blessure. Ne jamais oublier que chacun possède en lui, le pouvoir et les solutions qui lui sont salutaires. Il ne suffit que d’ouvrir cette boîte!
Outils pour développer sa résilience
La gestion du changement vers l’acceptation de la situation
La plupart des personnes qui accompagnent un proche ayant un trouble mental se demandent si un jour tout redeviendra comme avant. La vérité, c’est que personne ne le sait vraiment. La réponse est donc parfois « oui », parfois « non » et parfois, « peut-être ». Chaque personne étant différente, son processus de rétablissement sera aussi différent des autres. S’il y a une certitude, c’est que le cheminement de la personne ne sera pas linéaire et que son entourage devra s’adapter et apprendre à vivre avec cette nouvelle réalité.
Pour les membres de l’entourage, ce changement est souvent signe de déstabilisation, de souffrance, de malaise. Par contre, il peut aussi être signe de nouveauté, d’apprentissages, d’ouverture, de découvertes. S’adapter au changement… Si important, mais pas si simple ! Comment faire ?
Tout d’abord, il importe de prendre le temps de ‘décompresser’, d’absorber l’idée qu’un changement est à l’horizon. Ensuite, il faut prendre en considération les sentiments que cela suscite en nous tel que le malaise, voire la souffrance et l’anxiété engendrées. L’étape qui change tout, qui permet de réduire ces émotions négatives et de faire place à des émotions positives favorisant la mise en action constructive et l’ouverture vers les solutions possibles, est celle de la modification des pensées.
Les émotions sont le résultat des pensées. Lorsque nous percevons une situation sous un autre angle, d’un autre point de vue, nos émotions diffèrent et dès lors, nous devenons proactifs et le processus d’adaptation fait son cours.
Voici un petit tableau aidant pour visualiser ce processus.
Événement
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Mes pensées
(ce qui me vient en tête sur le moment) |
Mes émotions
(ce que je ressens à cet instant) |
Mes nouvelles pensées
(le même événement vu différemment) |
Mes nouvelles émotions
(Ce que je ressens en voyant les choses différemment) |
Exemple :
Mon conjoint m’a quitté pour une autre femme |
* Je ne le mérite pas, c’est injuste
* Il est méchant et hypocrite * Elle s’est introduite là où elle n’avait pas affaire * Je suis perdue
* Que vais-je faire * Et si je ne rencontre plus jamais personne * Qu’a-t-elle de mieux que moi * On aurait pu essayer de sauver notre couple * etc.
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* Frustration à 100%
* Déception à 110% * Anxiété à 90 % * Culpabilité à 85 % * Hostilité à 80 % * Tristesse à 100 % * Dépassé à 80 % * etc. (négatif) |
* Nous étions rendus à une autre étape dans nos vies
* Une nouvelle aventure s’annonce à moi * J’aurai du temps pour moi * Je vais passer plus de temps avec mes amies
* Cette relation m’a permis de mieux me connaître * Cette séparation me rendra plus forte *Voici une opportunité de faire de nouvelles rencontres * etc. |
* Frustration à 50 % * Déception à 40 % * Anxiété à 30% * Culpabilité à 10% * Tristesse à 60 % * Hostilité à 20% * Espoir à 80 % * Soulagement à 60 % * Sérénité à 40 % * Confiance à 75 % (négatif à la baisse, positif à la hausse) |
Lorsque l’on est en situation de changement, il est fort profitable de réviser ses pensées afin de voir les différentes stratégies adaptatives qui s’offrent à nous!
Un grand sage a dit un jour : « La vie est toujours en mouvement, donc en changement. Par le fait même, vivre c’est savoir s’adapter. » Le changement est naturel!
Gabrielle Brind’Amour, directrice générale L’Accolade Santé mentale